Chris, auteur à mes heures...

Henri

Il n'a vraiment rien, pas même un chez lui,
Rien que la rue et le vent pour tout abri.
On se le regarde traîner sa carcasse
Comme on regarde bêtement un chat qui passe.
Pourtant, dans le temps, il était quelqu'un,
Faut dire messieurs dames qu'il avait des biens
Mais pour une donzelle il a tout claqué
Maintenant il est sur le pavé.

On lui jette des pierres quand il fait la manche
Sur le parvis de l'église le dimanche,
Pourtant, Monsieur le curé s'est bien servit
Autrefois dans les poches du vieil Henri.
Aujourd'hui qu'il est pauvre, même le Bon Dieu
Fait grise mine et se détourne du vieux.
Y'a plus de paradis, pas même un été,
Maintenant il est sur le pavé.

Il traîne sa misère dans les rues de Paname,
Dans sa bouteille il revoit sa jeune femme,
Malgré que son coeur saigne, il n'a pas de haine,
Seule son âme est éternellement en peine.
Lorsqu'il se souvient de ces jours heureux,
Ses souvenirs lui piquent encore les yeux
Car un jour sa dulcinée l'a plaquée
Maintenant il est sur le pavé.

Où sont ses amis quand il était beau ?
Tous lui ont fait un petit dans le dos.
Il ne leur en veut pas, qui donne est un homme
Se dit-il et l'argent n'est à personne.
Pourtant quelques fois il aimerait croire
Que l'avenir, comme dans un miroir,
Se reflète sur tout le passé
Mais maintenant il est sur le pavé.

Il n'a vraiment plus rien, même son honneur
Est une mauvaise herbe parmi les fleurs.
Il regarde sa vie et tous ses sacrifices
Comme il regarderait un chien qui pisse.
Station Belleville, il trouva son destin
Dans la bouche du métropolitain,
Dessous la rame, fier, il s'est jeté,
Maintenant il est sous le pavé.